Un fleuron industriel
Pendant près d’un siècle, l’entreprise Menviel fut l’un des fleurons de l’industrie textile locale. Spécialisées dans les articles de bonneterie, ses deux unités de fabrication de Montpellier et Pérols figuraient parmi les plus performantes du territoire. Sous-vêtements pour femmes, hommes, enfants : chemises, culottes, guimpes, brassières sortaient de leurs métiers tournant à 35 tours minutes et capables, en 60 secondes, d’exécuter 410 hauteurs de maille ! De sorte qu’en 1941, en plein conflit mondial et malgré le blocus de matières premières, Louis et Gaston Menviel proclamaient fièrement : « Les Français n’iront pas nus ! »
De Montpellier à Pérols
Descendant d’une lignée de fabricants de bas, originaires de Sauve, le grand-père des industriels avait quitté son Gard natal à la fin du XIXe siècle. Installé à Montpellier, il avait lancé son activité de bonneterie grâce à des marchés de fabrication passés notamment avec la Maison Centrale des femmes, utilisant ainsi la main d’œuvre détenue aux travaux de tricotage. Installée au 9 rue Belmont, puis dans une grande maison bourgeoise près du Port Juvénal, l’entreprise devenue florissante ouvrit dès 1926 une annexe à Pérols, dans les anciens chais de la famille de Gaston Bazille.
Le souvenir des ouvrières
Dans sa maison près des étangs, Jeanne Figon se souvient des ouvrières qui venaient tous les matins, avant le travail, acheter leur croissant dans la pâtisserie familiale de la Grand Rue. Son mari, Yvan, chroniqueur de l’histoire locale, a publié quelques rares clichés des ouvrières installées à l’ouvrage ou sur les marches de l’usine, dans son bel ouvrage Pérols ; Images oubliées. « Mon père, formé aux métiers à tisser du nord de la France, avait sympathisé avec le directeur. Et lorsqu’une machine tombait en panne, c’était lui qu’on appelait ».
Quand l’usine devient médiathèque
Après avoir traversé le siècle, deux guerres mondiales et plusieurs mouvements de grève (dont celui de juin 1936 qui mit à l’arrêt tout le personnel de Pérols), l’usine de bonneterie poursuivit son activité jusqu’au début des années 60. Reprise par l’entreprise nîmoise Rey-Escojido et convertie dans la fabrication de t-shirts, elle employait encore une vingtaine d’employés à sa fermeture définitive, en juillet 1992. Il fallut attendre 2007 pour que l’histoire se remette en mouvement. Avec le projet d’ouverture dans les locaux inoccupés, de la médiathèque métropolitaine Jean Giono inaugurée en janvier 2012. La signalétique de bobines, ciseaux, machine à coudre, apposée sur les vitres et cloisons du bâtiment, guide aujourd’hui les usagers à travers les étages. Et rappelle à tous cette aventure humaine et industrielle.