Pourquoi donner son sang, ses plaquettes ou son plasma ?
Docteur Marty-Rieul : Parce que cela sauve des vies ! Un don de sang, c’est trois vies sauvées.
En effet, une fois prélevée, la poche de sang total est centrifugée afin de séparer les globules rouges du plasma et des plaquettes, qui sont transfusés séparément.
Les globules rouges seront transfusés en cas d'anémie, essentiellement dans les traitements des cancers, soit 47 %. Également en cas d’hémorragie, après une intervention chirurgicale, suite à un accident, suite à une hémorragie de la délivrance lors d’un accouchement... Les plaquettes sont transfusées principalement en cancérologie.
Quelle est l'importance du don de plasma ?
Le plasma est le liquide qui contient nos cellules sanguines. Il est composé à 90 % d’eau et 10 % de protéines, notamment les immunoglobulines et les facteurs de coagulation. L’intérêt de prélever le plasma, sans les cellules sanguines, est l’utilisation de ces protéines pour soigner les malades.
Le plasma se régénère très vite par rapport aux globules rouges ou aux plaquettes : les dons sont possibles tous les 15 jours.
Le don de plasma contribue à la fabrication de médicaments ?
Oui, tout à fait. Pour le plasma, il y a deux utilisations : soit il est transfusé, et nous sommes auto-suffisants en France à ce sujet, soit il est utilisé pour la préparation de médicaments à partir des protéines qui y sont présentes. Pour ces médicaments dérivés du plasma, nous ne sommes pas autosuffisants en France. Nous sommes obligés d’importer des médicaments, notamment des États-Unis. D'une part, cela va à l’encontre de notre éthique, étant donné que les donneurs y sont rémunérés. D’autre part, cela nous rend dépendants d’autres pays. C’est un vrai enjeu de souveraineté sanitaire, car si ces pays décident de fermer leur marché pour n’importe quelle raison, les médicaments dérivés du plasma pourraient manquer pour nos malades. Il existe déjà, au niveau international, une tension sur l’approvisionnement en immunoglobulines car ces protéines sont de plus en plus utilisées en immunothérapie, domaine thérapeutique qui se développe.
La production des médicaments dérivés du plasma est gérée par le Laboratoire Français du Fractionnement et des Biotechnologies (LFB) qui est un organisme public.
Comment les besoins ont-ils évolué ?
On constate depuis quelques années, avec les évolutions de la médecine, une moindre consommation de concentrés de globules rouges, notamment en chirurgie où le sang du patient peut être récupéré pendant l’intervention, puis réinjecté.
Cependant 10 000 dons de sang restent nécessaires chaque jour en France. Et certaines périodes sont sous tension car les donneurs ne donnent pas régulièrement. Ils viennent surtout lors des campagnes de sollicitation et d'appels au don. Le plus important est de donner régulièrement, toute l’année, en espaçant ses dons.
Concernant le plasma, les besoins sont en augmentation, comme évoqué, pour la préparation des médicaments dérivés du plasma.
Quels sont les principaux freins au don ?
Il y a souvent de l’appréhension à donner son sang, face à la douleur, peur de l’aiguille… Certains donneurs craintifs « sautent le pas » et une fois le don réalisé, se rendent comptent que cela ne fait pas si mal. La solidarité et la générosité derrière le geste l’emportent.
Il peut y avoir également de la méconnaissance, par exemple pour le don de plasma ou plaquettes.
En dehors de la Maison du don à Montpellier, y-a-t'il d'autres types de collecte du sang ?
Il y a les collectes mobiles. Plusieurs collectes sont organisées par jour avec nos dispositifs de prélèvement itinérants. Nous avons trois à cinq collectes mobiles par jour, rien que pour l’Hérault et jusqu’à 200 dons quotidiens, entre ceux réalisés à la Maison du don et lors des collectes mobiles.
Nous nous installons dans des salles qui nous sont mises à disposition : dans des entreprises, dans les universités, salles des fêtes des communes de la métropole de Montpellier et sur le département.
Le planning des collectes mobiles est établi sur l’année. On respecte le délai d’éligibilité au don de sang de huit semaines, donc on va aller dans une commune tous les deux mois par exemple.
Il y a également le camion EFS qui sort essentiellement lors de la journée des associations, sur les plages l’été...
Le plus important est donc de donner régulièrement, toute l’année, en espaçant ses dons. Quels sont vos objectifs au niveau local ?
Notre rôle à l’EFS, c’est essentiellement d’assurer l’auto-suffisance en produits sanguins pour nos malades, ainsi que le bon fonctionnement de la chaîne transfusionnelle, du donneur au patient : on collecte, on qualifie, on prépare et on distribue le sang dans les établissements de santé. L’EFS Occitanie possède des antennes départementales, avec leurs propres spécificités, leurs propres collectes et leur Maison du don comme à Montpellier, à Nîmes, à Béziers, à Toulouse…
Nos objectifs sont un prévisionnel défini par département, par rapport aux besoins des établissements de santé sur les années précédentes, à la population, au nombre potentiel de donneurs par bassin…
En 2024, les objectifs de la Maison du don de Montpellier sont : 4 200 prélèvements de sang, 4 500 de plasma et 2 000. Soit quotidiennement environ 15 poches de sang, 17 poches de plasma et 10 de plaquettes. Sur les collectes mobiles, l’objectif est de 55 000 poches de sang total.
Les donneurs se mobilisent-ils ?
La venue des donneurs de sang est aléatoire sur la Maison du don. Les collectes mobiles permettent de tenir les objectifs.
Les dons de plasma et de plaquettes, sur rendez-vous, sont les plus stables. Les donneurs sont sollicités par des campagnes événementielles, des campagnes de presse...
Nous avons également un "mobilisateur plasma" qui va sur les collectes mobiles et sensibilise les donneurs présents, car ce don reste méconnu. Il est possible de réaliser un don de plasma sur les trois Maisons du don de Montpellier, Béziers et Nîmes.
Et si les objectifs ne sont pas remplis ?
Le risque, si les objectifs ne sont pas remplis, c’est de manquer de produits sanguins dans les établissements de santé.
Nous avons identifié depuis longtemps des périodes où il y a plus de tensions : durant les périodes des vacances, les gens sont moins présents ou durant les fêtes, au retour des virus saisonniers, la veille des jours fériés… Nous mettons en place une logistique spécifique pour compenser ces périodes.
Par exemple, cette année avec les fériés et ponts du mois de mai, nous risquons de manquer de plaquettes : ces cellules ne se conservent que 7 jours et nous devons en prélever tous les jours. Exceptionnellement, le jeudi 09 mai, jour férié, la maison du don de Montpellier sera ouverte, notamment pour le prélèvement de plaquettes.
Il existe cependant une entraide entre les départements et régions.
La région Occitanie aide beaucoup l'Île-de-France, qui est une région très consommatrice en produits sanguins, étant la plus peuplée de France. Typiquement, on sait que pendant les JO, cela va être plus compliqué de prélever en Île-de-France et qu’on va devoir abonder encore plus.
Malgré certaines périodes de tensions sur nos produits sanguins, la France reste autosuffisante en transfusion sanguine.
Plus d'infos : Maison du don à Montpellier