SÉRIE "CONSULS À MONTPELLIER" // ÉPISODE 7

Consuls à Montpellier : « Malte est un carrefour stratégique »

04-06-25 - 14:00
Depuis 2017, Thierry de Cambiaire est consul honoraire de Malte. À travers cette fonction, il souhaite faire découvrir les atouts de cette île méditerranéenne, le plus petit État membre de l’Union européenne.
Thierry de Cambiaire  consul honoraire de Malte à Montpellier
© C. Marson
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Thierry de Cambiaire : Le consulat honoraire de Malte existe à Montpellier depuis les années 1990. C’est à l’initiative du gouvernement maltais, qui souhaitait renforcer sa présence dans le sud de la France à l’approche de son adhésion à l’Union européenne. Ma mère a été la première à occuper ce poste, qu’elle a tenu pendant une dizaine d’années. Nous sommes originaires du Languedoc mais nous avons des attaches familiales à Malte. Après une période où le poste était resté vacant, il m’a été proposé. Bien que je sois administrateur de sociétés et très pris par mes activités, j’ai accepté cette mission bénévole avec enthousiasme. Elle me permet de rencontrer des personnes issues d’horizons très variés, ce qui est passionnant.

Combien de Maltais vivent dans la région ?

Thierry de Cambiaire : Environ 4 000 ressortissants résident aujourd’hui en Languedoc-Roussillon. Il s’agit majoritairement de descendants de familles maltaises installées autrefois en Afrique du Nord et qui, lors des indépendances des années 50-60, ont choisi de s’établir dans le sud de la France. Beaucoup d’entre eux sont français, mais il n’est pas rare qu’ils sollicitent aujourd’hui la double nationalité pour préserver le lien avec leurs racines maltaises. Le sentiment d’appartenance nationale reste fort.

Comment définiriez-vous cette identité ?

Thierry de Cambiaire : Elle est profondément marquée par un mélange d’influences historiques, culturelles et religieuses. Elle est le résultat des multiples civilisations qui se sont succédé sur l’île : Phéniciens, Romains, Arabes, Normands, Chevaliers de l’Ordre de Saint-Jean, Français, Britanniques… Chaque peuple a laissé son empreinte, que l’on retrouve dans les traditions, l’architecture et le mode de vie. Malte est, à ce titre, un véritable musée à ciel ouvert. On y trouve notamment des temples mégalithiques parmi les plus anciens du monde, vieux de plus de 5 000 ans. La langue maltaise elle-même est un symbole fort de cette identité : proche de l’arabe, elle est enrichie d’influences italiennes, françaises et anglaises.

Quels sont les échanges entre Malte et le territoire ?

Thierry de Cambiaire : Une centaine d’entreprises de la région Occitanie commercent avec Malte ou y sont implantées. L’île attire grâce à son positionnement stratégique, son environnement multiculturel, une fiscalité attractive et une main-d’œuvre qualifiée. Plus d’un millier de Français y vivent actuellement. Malgré sa petite taille (316 km² et environ 500 000 habitants), Malte possède des secteurs économiques dynamiques, notamment le tourisme et l’industrie pharmaceutique. Le secteur maritime, avec ses chantiers navals et la logistique portuaire, joue également un rôle essentiel dans son économie.

Existe-t-il des points communs entre Montpellier et Malte ?

Thierry de Cambiaire : Oui, plusieurs ! Les deux territoires partagent un climat méditerranéen très agréable. Ils sont également riches d’un patrimoine historique et architectural remarquable. Enfin, Montpellier comme Malte accueillent une population jeune, étudiante, et restent ouverts à la diversité culturelle.

Sur les traces de l’Ordre de Malte

On l’ignore souvent, mais l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, plus connu sous le nom d’Ordre de Malte, a laissé une empreinte discrète mais réelle à Montpellier. Depuis 2007, plusieurs plaques dans les rues de l’Écusson rappellent leur présence. Installés dès le XIIe siècle dans le quartier du Petit-Saint-Jean, les frères de l'Ordre, appelés les Hospitaliers, y possédaient une maison, une église et un cimetière, sans pour autant y tenir un hôpital. Leur mission caritative passait par les soins à domicile et l’aide aux pauvres.

À partir de 1312, ils héritent des biens des Templiers. Leur patrimoine s’étend alors bien au-delà des murs de la ville, avec des domaines à Lattes, Pignan, Fabrègues ou encore Castries. L’Ordre devient l’un des plus grands propriétaires fonciers de la région, mais décline peu à peu. La Révolution met fin à leur présence, et leurs domaines sont vendus aux enchères. Dernier symbole fort : le dernier Grand Maître souverain, Ferdinand von Hompesch, s’éteint à Montpellier en 1805, à l’Hôtel de Guidais (place Pierre-Flotte), où il s’était retiré pour se soigner. Il repose encore à l’église Sainte-Eulalie.