Anniversaire : 110 ans pour Jeannette Laham, à Montpellier sa « ville de cœur »

01-02-24 - 08:00
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Née à Armentières le 1er février 1914, Jeannette Espouy de son nom de jeune fille, pose ses valises à Montpellier au début des années 1980. Sa « ville de cœur », où elle s’installe avec son époux et qu’elle ne quittera plus. Grâce à sa famille, unie, respectueuse des aînés et des valeurs familiales, ainsi qu’au dévouement d’une amie proche, Madame Laham fête aujourd’hui ses 110 ans paisiblement à son domicile. Portrait d’une grande dame qui rejoint désormais la courte liste des supercentenaires français.
Jeannette Laham
Jeannette Laham, lors de son anniversaire des 105 ans - ©DR
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Née le 1er février 1914 

Jeannette Espouy naît le 1er février 1914 à Armentières, près de Lille. Son père, Jean-Louis Espouy concevait et fabriquait des cuisinières en fonte dans le quartier de la Madeleine à Lille et avait épousé Berthe Fauvergue, couturière, le 9 mars 1913. Six mois après la naissance de Jeannette, bébé sage et dormeur, la Première Guerre mondiale éclatait. Son père, qui n’avait que de très rares permissions, ne connaîtra la couleur des yeux de sa fille qu’après sa démobilisation. Berthe Espouy, maman de Jeannette, tenait la mercerie de sa propre mère à Lille.

« Jeannette nous raconte très souvent les mêmes anecdotes se rapportant à cette période », confie Dominique Modena, sa cousine directe, qui habite Marseille. « Comme lorsque sa maman la promenait et qu’elle mettait dans son landau ses ustensiles de cuisine en cuivre pour éviter de les donner aux Allemands. Ou la gaufre qu’elle allait manger chez Méert avec sa grand-mère et qui, d’ailleurs, lui a été offerte pour ses 100 ans. Ou encore les grimaces faites à un officier allemand à travers la vitrine de la mercerie familiale, glaçant sa maman d’effroi. Jeu qui finalement s’était bien terminé, cet officier ayant lui-même des enfants dont il était éloigné ; il lui a ramené, quelques jours plus tard au retour de permission, une pâtisserie de sa région. » 

L’oncle de Jeannette, Pierre, mourra à Arras le 18 août 1915. Tandis que quatre ans plus tard, en 1919 naîtra son frère, également appelé Pierre.

Jeannette Laham et sa famille
Jeannette Espouy en 1921 avec ses parents, Berthe et Jean-Louis, ainsi que son frère Pierre, à Lille - ©DR

Seconde Guerre mondiale

Adulte, Jeannette apprendra le métier de modiste et restera, elle-même, très élégante toute sa vie, créant et confectionnant ses propres vêtements. Après un premier mariage qui ne dure pas, elle s’installe à Paris. Peu avant la Seconde Guerre mondiale, elle y rencontrera celui qui deviendra son époux pour soixante ans, alors étudiant en médecine : Jean Laham. 

Pendant la Seconde Guerre mondiale, le jeune couple souffrit comme la grande majorité des Français.

Puis, son mari Jean deviendra chef de clinique en cardiologie à la faculté de médecine de Paris et maître de conférences agrégé de cardiologie. De 1969 à 2003, il rédigera plusieurs œuvres textuelles, dont le dernier ouvrage et le plus connu, Syndromes de préexcitation ventriculaire, paru en 2003. Jeannette cesse d’exercer son activité pour le suivre et l’aider dans ses recherches, ainsi que dans la
rédaction de ses articles et écrits. Dans les années 1970, le couple fera un séjour à Damas. Jean exercera en cardiologie et Jeannette l’assistera. Ils quitteront la Syrie dans l’urgence en 1976 face aux événements.

Berthe Espouy, maman de Jeannette, décédera en 1978.

À Montpellier à partir des années 1980

Jean Laham exercera encore quelques années à Paris, avant que le couple ne vienne s’installer à Montpellier au tout début des années 1980, où il deviendra maître de conférences à la faculté de Médecine, avec son épouse à ses côtés. 
Jeannette perd son époux le 22 juillet 2008, à l'âge de 90 ans, alors qu’elle avait 94 ans. Elle donnera la totalité de ses recherches et ouvrages au professeur Jean-Marc Davy, également cardiologue à l’hôpital Arnaud de Villeneuve, pour la bibliothèque de la faculté de Médecine de Montpellier afin de les mettre à disposition des étudiants.

Habitant à la Cité fleurie depuis plus de 40 ans, Jeannette Laham a pu vieillir chez elle paisiblement, à Montpellier, sa « ville de cœur ». Elle a toujours été enchantée par sa vie à Montpellier : « C'est une ville reposante », dit-elle. « Après Lille, Paris et son séjour à Damas, Jeannette passe la seconde partie de sa vie à Montpellier. Gilda Masse, une proche amie, s’occupe d’elle comme si c’était sa mère. Elle l’aide au quotidien, aux côtés des auxiliaires de vie et des aides ménagères », poursuit Dominique Modena, sa cousine. 

« Une personnalité rigoureuse et perfectionniste »

Si c’est grâce au dévouement de sa famille et proches que Jeannette Laham a toujours demeuré à domicile, fait rarisssime, et peut aujourd’hui y souffler ses 110 bougies. C’est aussi à sa personnalité et à sa vision de la vie qu’elle doit son quotidien. 

Une force de caractère soulignée par le docteur Victor Bastide, son médecin traitant : « Madame Laham était suivie par le docteur Éric Marteau, décédé en 2006. Suite à cela j’ai pris le relais sur le suivi de cette dame, ainsi que de son mari qui était professeur de cardiologie et à l’origine de plusieurs publications. Elle m’a toujours marqué par sa personnalité bien trempée. Une personne rigoureuse, perfectionniste. Elle n’a jamais eu la langue dans sa poche, même si elle disait les choses gentiment. Une personnalité avec de l’humour également », décrit-il.  « Elle faisait, à la main, les reliures et maquettes des livres de son mari au millimètre près, ainsi que la mise en page de ses articles dans les revues de cardiologie. » Avant de se rappeler encore : « Dans sa jeunesse, elle a été danseuse classique. Elle me parlait de la danse. » Et de poursuivre « il y a quelques années, elle m’avait fait jurer de ne jamais l’hospitaliser, quoi qu’il arrive. Si elle est toujours là, c’est grâce à madame Masse, qui est très investie auprès d’elle. »

Un dévouement confirmé par l’intéressée : « On se connaît depuis tellement longtemps, qu’elle est comme ma grand-mère. Nous avons tissé des liens depuis ces 30 dernières années, ainsi qu’avec sa famille. Même à 100 ans, elle a toujours su de quoi elle parlait et eu du caractère », témoigne à son tour Gilda Masse, qui habite Lemasson également et pour laquelle elle est présente quand le besoin se présente.

110 ans, à domicile

Dominique, la cousine poursuit : « Jusqu’à ses 100 ans, Jeannette s'est débrouillée seule avec l’aide occasionnelle de ses amis et voisins, anciennement proches du couple, faisant ses commandes de surgelés, mais le plus souvent faisant elle-même sa cuisine, étant fine bouche. Gilda est très proche d’elle. Elle la considère un peu comme sa mère et s’occupe beaucoup d’elle, gère la noria des infirmières et aides ménagères. L’après-midi, elle peut avoir la visite des personnes de la paroisse. Petit à petit sa proche famille a disparu. Il lui reste une nièce et une petite cousine qui n’habitent pas Montpellier mais qui lui rendent visite et un petit cousin qui s’occupe de l’administratif et lui rend visite en famille. »

À la question d’une potentielle confidence faite par madame Laham sur son secret de longévité, Gilda répond : « Elle dit qu’il faut toujours travailler. Ce que j’ai toujours fait. J’ai toujours aimé les gens et m’occuper des personnes âgées, ce que j’ai fait une grande partie de ma vie. On apprend beaucoup à leur contact. »  « C'est grâce à cette famille unie, respectueuse des aînés et des valeurs familiales, du dévouement de Gilda que Jeannette a pu doucement vieillir chez elle, à Montpellier. Elle est l’exemple d’une personne âgée bien entourée, qui poursuit sa vie dans sa demeure. Le souhait, en ce début d’année, pour tous nos aînés. », conclut sa cousine Dominique. 

Jeannette Laham entourée de sa famille
Jeannette Laham entourée par sa famille, lors de ses 105 ans. Debout, de gauche à droite : sa cousine Dominique, sa petite cousine Chantal, sa nièce Najibé, sa petite cousine Christiane. Assises : sa nièce Michelle et Jeannette - ©DR

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