Il y a quelque chose de ravissant et précieux dans le terme d’opuscule. Une sorte d’évocation d’un objet miniature à glisser dans la poche ou le sac, et à utiliser en toutes occasions. Ce qui tombe plutôt bien, lorsqu’on franchit le seuil de la Librairie L’Opuscule, installée depuis 2019 rue Saint-Firmin, véritable cœur historique de Montpellier (en témoignent encore poutres et murs de pierre, qui ont accueilli pendant longtemps une galerie d’art). Aujourd’hui le lieu a été, en effet, transformé en un magnifique espace, peuplé de couvertures de beaux livres, d’objets designs, tasses, postes de radio, et même quelques bouteilles de vin.
Librairie et concept-store
Dans une première vie, Waldeck le gérant des lieux, proposait des soirées littéraires, invitant auteurs et producteurs de vins et dont la combinaison avait mené à la création de coffrets « Soif de lire ». L’idée est restée, ainsi que l’amour des beaux objets, du design, de la déco, qui illuminent l’ensemble des rayonnages, comme les éclats de beaux vitraux. Au milieu des rayons polars, sciences humaines, BD, jeunesse, littérature générale, le visiteur pourra prolonger ses envies de lecture, d’une expérience « concept store », alignant produits high-tech, arts de la table, sacs et accessoires, éclairages, objets, papeterie.
Librairie L’Opuscule – 10 rue Saint-Firmin – 04 99 63 39 79 – l-opuscule.com – facebook - Instagram
Votre parcours de libraire ?
J’ai travaillé pendant des années dans l’événementiel. Mais j’avais toujours en tête, comme un vieux rêve, l’idée un jour d’ouvrir une librairie. J’ai longtemps organisé, à Villeneuve-lès-Maguelone des apéros polars. Et lorsqu’il a fallu franchir le cap, j’ai entamé un programme de reconversion à l’INFL, l’actuelle École de la Librairie à Montreuil.
Ce que l’on ne sait pas du métier de libraire ?
Qu’au-delà de l’assortiment ou de la relation client, il y a une donnée importante à maîtriser qui est la gestion. Comme toute entreprise, une librairie doit être bien gérée pour pouvoir tenir, notamment dans un secteur très concurrentiel, où en raison du prix unique du livre, chacun vend le même « produit » au même prix.
Qu’est-ce qu’un bon livre ?
C’est une définition très personnelle, mais pour moi j’ai envie de dire qu’un bon livre doit nous apporter quelque chose, nous faire rêver. On doit pouvoir encore cheminer ensemble un certain temps, même après en avoir refermé la dernière page.
Le livre que vous recommandez à tout le monde ?
Martin Eden, de Jack London (1876-1916). C’est un livre que j’ai lu étant jeune, mais il résonne encore en moi des années après. Toute l’œuvre de Jack London est passionnante à lire, avec ses thèmes de prédilection, l’aventure, la nature sauvage. On pense à l’Appel de la forêt, Croc Blanc, tant de chefs d’œuvre. Mais Martin Eden est peut-être le plus autobiographique des ouvrages de Jack London, il y parle de son expérience de jeune auteur, issu d’un milieu pauvre, d’affrontement entre classes sociales.
3 Coups de Cœur
1. Malheur au vaincu, de Gwenaël Bulteau. Éditions Manufacture De Livres
1900. Sur les hauteurs d’Alger la blanche, la demeure de la famille Wandell vient d’être le théâtre d’un massacre. Le lieutenant Julien Koestler, chargé de l’affaire, se plonge dans la ville grouillante.
Un nouveau roman policier de Gwenaël Bulteau qui inscrit chacune de ses intrigues sur fond d’histoire. Les luttes sociales et féminines pour Le Grand Soir, le Lyon de la fin du 19e à l’époque de l’affaire Dreyfus, pour La République des faibles… Il mêle tous les ingrédients qui me passionnent, sur des thèmes très forts, la racisme, l’antisémitisme, la colonisation.
2. Là où les chiens aboient par la queue, de Estelle-Sarah Bulle. Éditions Liana Lévi
Une jeune femme née en banlieue parisienne, que seuls sa couleur de peau et des souvenirs de vacances relient à la Guadeloupe d’où est originaire son père, s’interroge sur son identité métisse.
Je suis très sensible à l’histoire de ce premier roman d’Estelle-Sarah Bulle, qui depuis a publié plusieurs titres, dont Les Étoiles les plus filantes, en 2021, qui nous entraînait des favelas de Rio aux plateaux de tournage du film culte Orfeu Negro. Jusqu’à son tout récent dernier roman, Basse-Terre.
3. L’Enfant dans le taxi, de Sylvain Prudhomme. Les Éditions de Minuit
Lors des funérailles de son grand-père, un homme apprend que celui-ci avait toujours dissimulé un lourd secret : la naissance d’un fils, née de ses amours illégitimes avec une Allemande, alors qu’il était engagé dans les armées d’occupation.
J’aime beaucoup cette histoire, l’écriture magnifique de Sylvain Prudhomme que nous avons déjà invité à la Librairie. Parallèlement à l’histoire du grand-père et de l’enfant illégitime, on découvre également celle du héros du livre, Simon, lui-même en proie à une séparation douloureuse. Un très beau roman émouvant, sur le thème de la filiation.
La Librairie L’Opuscule à la Comédie du livre
Vos auteurs : Nous avons cette année encore une sélection très riche. Avec la venue sur notre stand de Neige Sinno, auteure de « Triste Tigre », le livre coup de poing de la dernière rentrée littéraire. Nous accueillerons également Romain Puértolas pour son dernier ouvrage, publié aux éditions Le Dilettante « Comment j’ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès ». Sont également invités : le célèbre romancier espagnol Manuel Vilas, qui viendra présenter son dernier ouvrage, « Irène » ; ou encore la Montpelliéraine Nathalie Castagné, qui vient de publier « Vies, morts et renaissances de Goliarda Sapienza », qu’elle consacre à l’auteur du célèbre « L’Art de la Joie »