Série "60 ans d’intercommunalité" // épisode 4

60 ans de l'intercommunalité : Jacques Vallet ou l’intercommunalité vue depuis la direction des services

22-02-25 - 06:30
Imprimer
En provenance de Grenoble, alors véritable laboratoire de l’aménagement du territoire, Jacques Vallet est nommé secrétaire général adjoint de la Ville en octobre 1983. Entre juillet 1988 et avril 2004, il occupe les fonctions de directeur général du District de Montpellier, puis de l’Agglomération. Il prend sa retraite en 2008, après un nouveau passage à la Ville.
Jacques Vallet
Jacques Vallet a notamment été directeur général du District de Montpellier, puis de l’Agglomération, entre 1988 et 2004 - ©Archives de Montpellier
Écouter

Comment se passent les débuts de l’intercommunalité à Montpellier ? 

Jacques Vallet : À l’origine, le District de Montpellier rassemble 13 communes. Ses compétences concernent surtout la gestion des ordures ménagères, la lutte incendie et la création de zones d’activités, comme à Vendargues ou Saint-Jean-de-Védas. Peu de temps après mon arrivée à Montpellier, Prades-le-Lez et Baillargues rejoignent le District en 1985. C’était alors une administration encore un peu faible, un peu fragile, qu’il fallait consolider et assoir, notamment auprès des maires. Georges Frêche avait la volonté de booster l’intercommunalité en accélérant les transferts de compétences. Mon travail était de cadrer un peu tout ça et de montrer l’intérêt de l’intercommunalité, son côté gagnant-gagnant… L’idée était la mise en cohérence d’un territoire divers et assez déséquilibré, via l’administration et l’aménagement d’un espace de vie plus large et plus solidaire. Le dynamisme de Montpellier étant la locomotive du développement du territoire. La montée en compétences a été progressive : développement économique, plans de déplacements (NDLR : mobilités) et d’occupation des sols, équipements sportifs et culturels, logement... La gestion de l’eau également, avec notamment la construction de l’usine de captage de la source du Lez, portée par le District. Les déchets, c’est le plus compliqué ! On le voit encore aujourd’hui… De toute façon, ces compétences ne peuvent pas être assumées efficacement à l’échelle communale. 

Jacques Vallet (à droite), à la tribune aux côtés de Georges Frêche, lors de la réunion des maires du District en 2001
Jacques Vallet (à droite), à la tribune aux côtés de Georges Frêche, lors de la réunion des maires du District en 2001 - ©Archives de Montpellier

Vous avez œuvré pour le passage du District à l’Agglomération. Racontez-nous cette aventure… 

J.V. : Lors de la phase de constitution de l’Agglomération (NDLR : Communauté d'Agglomération), j’étais un peu le « missi dominici » de Georges Frêche. Nous faisions ensemble le tour des communes pour montrer les avantages, expliquer les défis à relever… Cela se faisait lors de réunions publiques ou pendant des conseils municipaux. Je me souviens d’une plaquette utilisée comme outil pédagogique dans nos tournées. Elle avait pour titre : L’avenir en partage. Je crois que c’est un bon résumé de l’intercommunalité. Je retournais aussi tout seul dans les communes. Comme j’étais moins impressionnant que M. Frêche, les échanges étaient plus détendus. J’y ai consacré beaucoup de temps. C’était le temps de la construction juridique et humaine, avec les maires et leurs collaborateurs. Il fallait écouter et convaincre tout le monde. J’avais aussi institué une réunion mensuelle avec tous les secrétaires généraux des communes concernées afin évoquer régulièrement l’ensemble des problèmes rencontrés. Les relations avec les communes étaient plutôt bonnes, empreintes de respect mutuel, même si, évidemment, les conflits existaient : Lattes et Palavas, déjà ! (sourire)

campagne affichage "l'avenir en partage" en 2002 arrêt de tramway Occitanie
La campagne "L'avenir en partage" s'affiche sur les arrêts de tramway en 2002 - ©Fonds Daniel Boulet - Archives de Montpellier
réunion Lavérune en 2001
Réunion publique à Lavérune en 2001. Présent, Jacques Vallet est le 2e en partant de la gauche - ©Archives de Montpellier
  • 0
  • 1
campagne affichage "l'avenir en partage" en 2002 arrêt de tramway Occitanie
La campagne "L'avenir en partage" s'affiche sur les arrêts de tramway en 2002 - ©Fonds Daniel Boulet - Archives de Montpellier
réunion Lavérune en 2001
Réunion publique à Lavérune en 2001. Présent, Jacques Vallet est le 2e en partant de la gauche - ©Archives de Montpellier

Comment la loi Chevènement de 1999 accélère le mouvement ? 

J.V. : En 1999, la loi Chevènement sur la décentralisation dote les intercommunalités de ressources propres avec la perception de la taxe professionnelle. Avec la DDE et le préfet Constantin, nous avions effectué un travail de préparation très sérieux. Nous avions même envisagé jusqu’à 42 communes au sein de l’Agglo ! Les transferts de charges s’harmonisaient avec les transferts de compétences, le tout dans un équilibre financier strict. Une dynamique autosuffisante en quelque sorte, dédiée au développement de l’intercommunalité. Il faut souligner aussi une aide de l’État avec une Dotation globale de fonctionnement majorée de 30%. 

En 2002, l’Agglomération est donc constituée avec 38 communes. Le projet est juridiquement nickel, politiquement ambitieux et économiquement cohérent. Malheureusement, une fronde, sur fond de rivalité avec Jacques Blanc, alors président de la Région Languedoc-Roussillon, provoque une scission et le départ de sept communes. Cette fronde était en partie contre Georges Frêche, qui faisait figure d’épouvantail localement et nationalement, et en partie pour une puérile et peu justifiée « préservation de l’identité locale ». 

Quel est votre sentiment personnel sur la construction de l’intercommunalité à Montpellier ? 

J.V. : J’ai été très investi dans le projet, avec une équipe très dynamique, une administration de mission et j’aimais beaucoup ça. On a beaucoup bossé, dans une bonne ambiance. Je le referais, c’était vraiment un challenge passionnant. J’avoue une certaine fierté d’avoir marqué un temps et un territoire positivement. J’ai été témoin et acteur de tellement de transformations en faveur du territoire et de Montpellier. C’est aussi beaucoup de belles rencontres, une belle aventure humaine. Encore aujourd’hui, je reçois diverses marques de respect et d’affection, et cela fait plaisir. Georges Frêche était un homme impressionnant, un grand visionnaire. Mais, bien que capable d’être à l’écoute et de se remettre en question, il n’était pas toujours facile à vivre ! La discussion était possible, mais il fallait avoir bien préparé son dossier ! (sourire).

Comment voyez-vous le futur de l’intercommunalité ? 

J.V. : Aujourd’hui, il n’y a plus du tout de compétition à l’intérieur de la Métropole. La priorité est, à mon avis, de renforcer les liens avec les Communautés de communes voisines pour continuer à développer le territoire. 

source du Lez
La captation de la source du Lez via l'usine Avias est une réalisation du Disctrict de Montpellier au début des années 1980 - © Christophe Ruiz

Source URL: https://encommun.montpellier.fr/articles/2025-02-22-60-ans-de-lintercommunalite-jacques-vallet-ou-lintercommunalite-vue-depuis-la