Rien n’est ce qu’il semble être. À commencer par le titre de l’exposition, « Haute Peinture, Péchés Couture », qu’une lecture en diagonale vous restituera autrement, « Haute Couture, Péchés Peinture » … Emery Baï, artiste peintre et commissaire de l’exposition, semble s’être amusé à brouiller un peu les pistes. Laissant des papillons se poser partout sur les œuvres, entre les deux étages des locaux de l’ancienne médiathèque Fellini (escalators du Polygone bas donnant sur Antigone) où est présentée l’exposition jusqu’au 25 octobre, sous la houlette de l’association Waabeme. Originaire du Bénin, passé par l’école des Beaux-Arts de Montpellier où il réside et travaille aujourd’hui, Emery Baï s’est adjoint le travail de quatre autres figures éminentes du « Black Excellence » pour célébrer l’art africain dans ce qu’il a de plus inventif et diversifié.

Les photos de Mario Epanya, originaire du Cameroun et installé à Paris, sont aujourd’hui célèbres sur la scène internationale. Notamment depuis 2010, lorsqu’il s’amusa à détourner les couvertures du célèbre magazine de mode Vogue pour en créer une version « Africa ». Une manière pour lui de rééquilibrer la présence du corps et de la beauté africaine qu’il jugeait sous-représentés dans les secteurs de la beauté et de la mode.

Au fil de l’exposition, présentées sur mannequins, les créations de Petros Tetteh, fondateur et directeur artistique de la marque Teed, transforment en éléments précieux les matières naturelles, coton, plumes, raphia… Ses créations uniques, somptueuses, inventives, allient modernité et tradition. Utilisant en ceintures, coiffes, colliers, les magnifiques "cauris", coquillages autrefois utilisés comme monnaie courante dans plusieurs endroits de la planète.


On admirera aussi le travail de Thomas Rebuffel, designer franco-ghanéen, qui présente, avec le Réunionnais Pierre Tassin, quelques pièces de son atelier « Small small studio », dédié à la création d’objets à la fois fonctionnels et artistiques, explorant les matériaux locaux et les techniques traditionnelles, en lien avec des artisans partenaires, pour créer des pièces uniques et intemporelles.





Maître de cérémonie, initiateur de la programmation, Emery Baï, désormais Montpelliérain mais originaire du Bénin, s’amuse dans ses toiles à créer des collisions entre l’histoire de l’art et la culture populaire. Pour mettre en scène les 7 péchés capitaux, qui servent de fil conducteur à l’exposition, il mixe plusieurs influences, venues des origines de la peinture, de la photographie ou du cinéma (on reconnaîtra ainsi la figure de Marilyn Monroe transformée en sirène, ou la houppe blanche de la Miranda Preston du Diable s’habille en Prada) dans quelques uns de ses grands formats présentés dans l’exposition.
Ses muses, comme l’exprime son petit carton de présentation, « se parent d’or et de lumière, rappelant avec ironie les déficits de représentation qui l’ont marqué dans son enfance… Il nous propose une allégorie joyeuse et colorée où la plastique des corps se fait voluptueuse, des ports altiers, des regards fiers et des attitudes énigmatiques. L’ensemble est à la fois glamour, spirituel et résolument sensuel ».
« Haute peinture, Péchés Couture – Portraits de la beauté noire » - jusqu’au 25 octobre – Ex médiathèque Federico Fellini, 1 place Paul Bec (espace d’exposition jouxtant l’entrée du Polygone par le grand escalator, côté Antigone).

VOIR L’AFRIQUE SOUS UN AUTRE REGARD
Emery Baï, artiste peintre, commissaire d’exposition
« J’ai été inspiré dans ce projet d’exposition par le livre de Mario Epanya, publié en 2017, « Beautiful. Portraits de la beauté noire », hommage à la beauté noire féminine. L’idée était de prolonger ce travail photographique, d’autres images, de portraits, de créations couture. Certes, en mettant en avant la jeune génération, mais en essayant aussi de rendre hommage à de grandes figures de la création qui m’ont inspiré tout le long dans ma démarche artistique. Dans l’un de mes tableaux, intitulé « L’orgueil » - puisque l’idée de l’exposition était de décliner les 7 péchés capitaux – je rends ainsi hommage au créateur de mode Imane Ayissi, l’un des premiers stylistes Afro-descendant à avoir intégré la Chambre Syndicale de la Haute Couture parisienne. »
Pourquoi venir voir l’exposition ?
« Pour voir l’Afrique sous un autre regard. On y interroge les mythes, on célèbre la beauté africaine mais aussi ses savoirs-faire. Avec un univers métissé. Empruntant à différentes influences, tissant des liens entre tradition et modernité. Les générations actuelles se réapproprient des codes culturels longtemps délaissés. On le voit très bien dans le travail de Petros Teethe, qui redonne ses lettres de noblesses au raphia, mêle tissu et fibres naturelles… Nous ne donnons à voir que des pièces uniques, représentations de l’excellence et du dynamisme de la jeune création africaine. Le tout dans un cheminement poétique, bucolique, entre bouquets de fleurs, toiles, objets, mode. Un univers inspiré de Dior, de Lanvin, sorte d’allégorie joyeuse et colorée dans laquelle chacun peut se perdre et se divertir en fonction de ses différentes sensibilités. »

ACCOMPAGNER LES PROJETS CULTURELS
Naomie MAISHA HONGOTHA, chargée de projet de Waabeme Coopération
« Association support de l’exposition « Haute Peinture, Péchés Couture », Waabeme Coopération a été créée en 2024. Elle a pour vocation de servir de trait d’union entre différents partenaires et accompagner les projets culturels de nombreux artistes. Montpellier est un vivier culturel incroyable. Et la deuxième Biennale Euro-Africa a été l’opportunité d’ouvrir aux Échelles de la Ville, un Centre Culturel Éphémère sur le thème « Portrait de la Beauté Noire ». L’espace est ouvert au public jusqu'au 28 octobre, de 10h à 20h, en entrée libre, présentant exposition, littérature, table ronde, musique… »
>>> Prochain rendez-vous ce lundi 20 octobre, à 18h avec le restaurant Le Maki, autour de l’art culinaire africain, avec dégustation et découverte.
