Série "Quand amour, art et Europe ne font qu'un" // Épisode 1

« À New-York, nous nous sommes sentis européens pour la première fois »

15-11-23 - 08:00
05-12-23 - 15:48
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Montpellier 2028 : Nathalie Trovato et Gregory Forstner habitent Montpellier depuis cinq ans. Si les deux artistes récusent toute attitude nationaliste, ils ont mis du temps avant de revendiquer leur origine européenne et d’intégrer le passé dramatique du vieux continent.
Nathalie Trovato et Gregory Forstner.
©L. Séverac
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C’est à 10 000 mètres d’altitude que Nathalie Trovato et Gregory Forstner se sont rencontrés. C’était sur le vol Dubaï-Nice, pour lequel la jeune femme était hôtesse de l’air. Leurs premiers échanges se sont faits en anglais. Ce détail est emblématique de la dimension dans laquelle ces deux personnes évoluent depuis leur naissance. Un monde cosmopolite, sans frontières, où les idées et les hommes circulent en toute liberté. L’un n’était pas encore le peintre reconnu d’aujourd’hui, dont le Musée d’Art Moderne de la ville de Paris acquiert les œuvres. L’autre n’avait pas encore trouvé sa voie en tant qu’illustratrice. Le premier est franco-autrichien. Dans les veines de la seconde coule le sang sicilien de ses grands-parents. Le couple, formé il y a 28 ans, partage une envie d’ailleurs qui les mènera outre-Atlantique.  « C’est aux États-Unis, où nous avons vécu 10 ans, que nous nous sommes sentis européens pour la première fois. » 

Une réflexion sur les racines 

Ils ne s’étaient jamais posé la question. Leur identité européenne coulait de source. Chacun profitait naturellement des facilités de circulation sur le vieux continent. « J’ai pu ainsi travailler plusieurs années à Londres », explique Nathalie, qui a été sensible à l’atmosphère multiculturelle de la capitale anglaise. C’est pourtant lors d’un séjour en Irlande que la jeune femme a touché du doigt l’importance des racines. « Là-bas, j’ai été frappée par la volonté farouche des habitants de revendiquer une identité culturelle. C’était une expérience nouvelle pour moi qui, jusqu’alors, ne me sentais pas particulièrement attachée à une terre. Cela m’a fait réfléchir sur mes origines. »

Une plage en Irlande.
Une plage d'Irlande, lieu qu'affectionne particulièrement Nathalie Trovato - ©Jon Sullivan

Un passé familial compliqué

Né au Cameroun, où son père, autrichien, travaillait, Gregory a mis, lui aussi, un certain temps avant de revendiquer ses origines. « Mon père ne m’a jamais parlé allemand à la maison. On parlait français. En revanche, c’est en anglais que je lui écris. » Revenu en Europe, la famille s’installe à Nice et le jeune homme décide d’intégrer l’Université des arts appliqués de Vienne, un peu par hasard. Il y découvre alors les peintres autrichiens du début du XXe siècle et prend conscience de la richesse culturelle du pays paternel. Mais aussi du passé tourmenté de l’Autriche. « Chez ma grand-mère, il y avait une photo de mon grand-père, qui avait quitté la maison familiale plusieurs années avant ma naissance. Il était en uniforme de Waffen SS. Sa femme n’en parlait pas trop. J’ai su par la suite qu’il avait été engagé, sans trop savoir ce qu’il faisait, comme beaucoup de jeunes de cette époque. » Un passé que la société autrichienne a mis du temps à affronter. « L’état d’esprit est assez hypocrite. C’est pour cela que les artistes contemporains sont parfois radicaux, comme le cinéaste Michael Haneke. Ils veulent réveiller les consciences. » Héritier de ce lourd passé familial, Gregory Forstner fait remarquer qu’il est aussi, du côté maternel, le petit-fils d’un résistant français, Albéric de Maistre, décoré par les gouvernement anglais et américains pour son implication directe dans la libération de la France. Néanmoins, cette ascendance marque désormais son travail. 

Peinture de G. Forstner montrant deux chiens portant un casque allemand, dans une barque.
"Le casque allemand deviendra dans mon travail le signe distinctif de la responsabilité d’une transmission d’un héritage résultant de la folie des hommes. » - ©G. Forstner

La dynamique montpelliéraine

C’est en 2018 que le couple et leurs deux filles s’installent à Montpellier. « Après notre expérience New Yorkaise, nous cherchions un "autre sud" que Nice et la côté bleue que nous connaissions déjà. Nous avions eu écho de la dynamique culturelle avec notamment la création du MO.CO, et nous avons pensé que c'était une ville qui avait encore beaucoup de potentiel pour grandir. » Depuis, les deux artistes sont partie prenante de l’écosystème culturel du territoire et apportent leur pierre à la légitime ambition de Montpellier à devenir Capitale européenne de la culture en 2028.   

Nathalie Trovato devant sa toile.
Plus apaisé, le travail de Nathalie Trovato figure un monde coloré - ©Nathalie Trovato

Montpellier, candidate pour être Capitale européenne de la culture 

Montpellier et toutes les collectivités partenaires à ses côtés ont été présélectionnées parmi les 4 finalistes pour devenir Capitale européenne de la culture en 2028. Elles poursuivent ainsi leur travail de coopération et portent un véritable projet de territoire ambitieux, intégrateur, tourné vers l’avenir. 154 communes s’associent ainsi pour penser les défis contemporains et y apporter une série de réponses concrètes grâce au levier de la culture. Depuis 2022, cet élan partagé s’illustre sur le territoire de la candidature par 85 projets culturels qui développent de nouveaux partenariats européens. La ville lauréate sera désignée le 13 décembre. 

+ d’infos : montpellier2028.eu

>>Lire aussi : Tous unis pour la candidature


Source URL: https://encommun.montpellier.fr/articles/2023-11-15-new-york-nous-nous-sommes-sentis-europeens-pour-la-premiere-fois