En 2019, le film d’ouverture de Cinémed était Adults in the room de Costa-Gavras. Vous étiez dans la salle et cette annonce a été suivie d’une longue standing ovation de l’Opéra Berlioz. Les organisateurs de Cinémed disent que c’est le point de départ de la rétrospective qui vous sera consacrée du 17 au 25 octobre.
Claudine Nougaret : On a été très surpris d’être aussi bien accueillis. Même si c’est un peu le fruit du hasard car nous avions le même distributeur que Costa-Gavras et il nous avait invités en sachant que nous étions sur Montpellier.
Raymond Depardon : Pour la petite histoire, à Paris, nous étions voisins avec Costa-Gavras et il y a toujours eu entre nous une estime mutuelle. Nous traitons des sujets de façon différente mais on s’est toujours retrouvés sur ce que j’appellerais une sorte d’humanisme international.
C’était une évidence pour vous de répondre à la proposition de Cinémed sous cette forme de rétrospective ?
Claudine Nougaret : Nous avons cédé le catalogue de notre société de productions "Palmeraie et Désert" aux "Films du Losange" en 2023, en étant certains d’avoir une pérennité d’exploitation des films. Nous restons dans une famille cinématographique qui est la nôtre. Les Films du Losange ont continué le travail de numérisation que j’avais initié. Il est aujourd’hui complet pour une rétrospective. J’ai déjà fait partie du jury de Cinémed. C’est un festival remarquable qui a une ligne éditoriale artistique et politique formidable. Dans cette ouverture sur des cinémas méditerranéens que l’on ne connaît pas, il y a des perles rares.
Vous serez présents durant toute la semaine de Cinémed ? Que deviendra cette rétrospective ensuite ?
Claudine Nougaret : Autant que possible et avec grand plaisir. Il y aura notamment deux masterclasses importantes à Cinémed. Nos films sont un peu moins connus ici que les photos de Raymond. À partir de Cinémed, la rétrospective circulera. Les Films du Losange ont déjà des réservations dans plusieurs salles de cinéma de France.

Parlez-nous maintenant d’“Extrême hôtel”, cette exposition à venir dès le 2 décembre au Pavillon populaire.
Raymond Depardon : Après la donation de photos au musée Fabre (1) que nous avons faite au début 2024, Michaël Delafosse m’a proposé une carte blanche pour la réouverture du Pavillon populaire, après les travaux à la fin 2025. C’est un lieu central, assez unique, ouvert et la démarche de la Ville sur la gratuité est assez exceptionnelle. J’ai plus de 80 ans et j’ai pensé que c’était le moment de permettre à la nouvelle génération de photographes et de conservateurs de porter un regard nouveau sur mes photos. C’est le travail qu’ont fait Simon Depardon, photographe et cinéaste, et Marie Perennès, conservatrice (2). Simon prépare par ailleurs un film sur mon travail photographique. C'est ma façon de transmettre.
Claudine Nougaret : Le parti-pris que Raymond a choisi sur cette exposition est d’être uniquement sur la couleur, de ses débuts à aujourd’hui. Cela va être un regard complètement neuf sur son œuvre. Avec bien évidemment une photo de « Paysans » dès l’entrée mais également beaucoup de surprises.
Raymond Depardon n’est-il pas devenu plus Montpelliérain que Caladois (3) ?
Raymond Depardon : Je suis toujours un peu une pièce rapportée. Claudine, elle, est Montpelliéraine. Mais je suis heureux d’être là. Montpellier est une ville qui aime le cinéma, la photographie, la culture. Et puis ici, il y a une chose assez rare. La lumière est quand même formidable. Cela donne encore envie de faire de nouvelles photos. Je connais bien l’arrière-pays mais il est tellement riche ! Si le temps m’est donné, j’espère encore pouvoir lancer de grandes séries. (4).
(1) Raymond Depardon et Claudine Nougaret ont fait don au musée Fabre de trois séries : « Rural », « Son œil dans ma main » et « Communes », soit près de 200 tirages.
(2) Le commissariat de l’exposition sera assuré par Simon Depardon et Marie Perennès.
(3) Le photographe est natif de Villefranche-sur-Saône.
(4) Le travail répertorié de Raymond Depardon représente 1 250 000 négatifs, sans compter ses travaux à la chambre photographique.
