Roderick Cox : « J’ai de la chance de travailler à Montpellier »

13-09-25 - 06:30
Ce qu’il aime à Montpellier, ses ambitions pour l’Opéra-Orchestre, ses « coups de cœur » de la rentrée 2025/2026 : rencontre avec le chef d’orchestre américain Roderick Cox, nommé l’an dernier à la direction musicale de l’Opéra Orchestre National Montpellier (OONM).
Portrait de Roderick Cox à l'Opéra Comédie
© Guilhem Canal
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Il débutera la saison le vendredi 10 octobre, sur la scène de l’Opéra Berlioz. Avec un programme « explosif », mêlant l’œuvre éclair de John Adams (4 minutes) Short Ride in a fast machine à l’envoûtant concerto pour piano n°1 de Liszt interprété par Bertrand Chamayou. Deux pièces suivies du célébrissime Sacre du Printemps d’Igor Stravinsky, créé à Paris en 1913 et qui fit scandale en son temps. 

Magnifique ouverture pour le jeune chef américain Roderick Cox, qui a pris en automne dernier ses fonctions au poste de directeur musical de l’Opéra Orchestre National Montpellier (OONM). Avec une dizaine de rendez-vous – tant sur la scène lyrique que symphonique – qui s’ajoutent à son calendrier d’étoile montante de la scène musicale internationale, appelé à diriger les ensembles les plus prestigieux de la planète, de Sydney à Rotterdam, en passant par Berlin, Atlanta ou Birmingham.

Quels sont les lieux que vous aimez à Montpellier ?

Roderick Cox : Je dois commencer par l’Opéra-Comédie, cette incroyable maison. Lorsque je suis arrivé ici, dès le premier coup d’œil, j’ai été fasciné par son architecture, la décoration intérieure. J’avais du mal à me persuader que c’était l’endroit que je pouvais appeler mon « lieu de travail ». J’adore aussi les rues anciennes du centre-ville, avec les petits restaurants et leur plat du jour, manger un croissant dans un petit square… 

Comment définiriez-vous le charme de la ville ?

Roderick Cox : Pour moi c’est une ville très différente de toutes celles que j’ai pu connaitre. Certainement très différente de ma ville natale, Macon, où j’ai grandi aux États-Unis. À l’exception peut-être de la chaleur en été, qui me rappelle la Géorgie. J’apprécie bien sûr la proximité de la mer. En 15 à 20 minutes on a l’impression d’être ailleurs. Avec cette possibilité de combiner des lieux de nature, de solitude et les rues animées, la jeunesse, l’opéra, l’orchestre symphonique, les festivals. C’est génial parce qu’on peut avoir le meilleur des deux mondes. 

Est-ce que tout cela a compté dans votre décision de venir travailler à Montpellier ?

Roderick Cox : Bien sûr. C’est une décision partagée entre l’organisation qui a dû me choisir pour occuper ce poste et puis moi qui l’ai accepté. Ce que je n’aurais sans doute pas fait si je n’avais pas autant apprécié d’y vivre, parce que j’y passe quand même beaucoup de temps au fil des ans. Mais je peux vous dire que chaque fois que je prends l’avion pour venir à Montpellier, c’est une véritable excitation. Dès que j’arrive à l’aéroport, que je vois le temps magnifique, c’est toujours un bonheur d’être ici. Et puis pouvoir venir à pied au travail, traverser les rues, les places. À chaque fois je me dis, « waouh, j’ai tellement de chance de travailler ici ! ».

Roderick Cox et Valérie Chevalier
En compagnie de Valérie Chevalier, directrice générale de l'Opéra Orchestre National Montpellier - © C. Marson

Quels sont vos objectifs aujourd’hui en tant que directeur musical de l’Opéra-Orchestre ? 

Roderick Cox : Tout d’abord, l’essentiel était d’assurer une bonne alchimie entre nous. J’ai joué pour la première fois avec l’Orchestre de Montpellier en 2021, pendant la période du COVID. J’ai tout de suite été impressionné par cette sonorité unique, très personnelle. Parmi nos objectifs principaux, il y a bien sûr celui de continuer à faire progresser cet orchestre. Douze nouveaux musiciens ont rejoint l’ensemble depuis mon arrivée, ce qui est assez substantiel. Il est donc important de maintenir la personnalité et la qualité de l’orchestre, tout en travaillant à affiner encore davantage le son. Je parle de l’orchestre, mais je veux aussi souligner les progrès très importants réalisés par le chœur de l’Opéra, sous la direction de la cheffe Noëlle Gény. 

En matière de répertoire ?

Roderick Cox : Mon deuxième objectif était en effet d’élargir le répertoire que nous présentons, non seulement pour le lyrique mais aussi pour la partie symphonique. En tant qu’Américain j’ai à cœur de faire connaître tout un répertoire écouté et découvert dans ma jeunesse, comme les pièces de Gershwin ou d’Aaron Copland. En y ajoutant le répertoire de Samuel Barber, de John Adams ou des compositeurs moins connus, comme Julia Perry ou Valerie Coleman. Tout en équilibrant cette programmation avec le grand répertoire français, qui fait partie de l’identité de l’orchestre et en explorant aussi le répertoire de nouveaux compositeurs. Comme celui du compositeur et chef d’orchestre finlandais Esa-Pekka Salonen qui sera au programme en avril prochain. En élargissant notre répertoire, nous sommes en mesure de raconter au public, à tous les jeunes qui vivent ici, une variété d’histoires différentes sur le monde que nous habitons.

Concert à l'Opéra Comédie pendant la Comédie du Livre
© OONM
Roderick Cox dirigeant l'orchestre
© OONM
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Concert à l'Opéra Comédie pendant la Comédie du Livre
- © OONM
Roderick Cox dirigeant l'orchestre
- © OONM

Avez-vous des projets pour faire rayonner l’orchestre plus largement ?

Roderick Cox : Oui, c’est aussi un objectif que nous nous sommes fixés. D’accroître notre profil international. Ce qui passe par des projets d’enregistrement, mais aussi des déplacements de l’orchestre. Comme l’an prochain où l’orchestre sera présent au Festival de Bregenz en Autriche, un rendez-vous prestigieux et une chance formidable. Cette curiosité autour de l’orchestre, cette forte demande qu’il suscite sont très importants, parce que nous sommes les ambassadeurs de Montpellier.

Vous allez aussi vous prêter à une expérience nouvelle : un concert « au cœur de l’orchestre », où le public sera présent sur scène, au milieu des musiciens ?

Roderick Cox : Oui, ça va être une expérience intéressante pour moi. J’ai tellement l’habitude de voir l’orchestre comme un espace restreint, resserré et intime. Avoir le public à l’intérieur de cet espace, au cœur de notre famille pour un petit moment court, j’avoue que j’en suis très curieux moi-même. Je suis très ouvert aux nouveautés, aux collaborations. C’est tellement important pour un orchestre de ne jamais trop s’installer dans le confort. Mais de se réserver des nouvelles voies possibles, nombreuses et variées. Avec cette volonté aussi d’ouvrir le rideau. De supprimer la distance qui peut parfois exister entre nous et le public.

Vous vous sentez adopté par les Montpelliérains ?

Roderick Cox : En travaillant à Montpellier je découvre le plaisir de faire partie d’une communauté. Le reste de l’année je voyage d’un orchestre à l’autre, en tissant des liens éphémères. Ici, j’ai l’occasion d’avoir un vrai foyer artistique, de pouvoir approfondir le lien avec les musiciens, les techniciens, toute l’équipe. Mais aussi de prendre le temps pour rencontrer les gens, d’installer des lieux familiers, restaurants, cafés, où l’on connait votre visage, vos habitudes… C’est une manière de donner du sens à l’art, mais aussi à ma vie.

Roderick Cox à l'Opéra Comédie
© Guilhem Canal