Les enfants martèlent, construisent, grimpent, démontent, reconstruisent. Le terrain d’aventures, conçu comme un laboratoire à ciel ouvert, est à mille lieues des aires de jeux classiques : ici, pas de toboggans colorés ou de structures sécurisées à outrance. À la place : des planches de bois, des palettes, des cordes, du tissu, des outils... et surtout, une imagination débordante.

Une pédagogie du « faire »
Le concept de terrain d’aventures s’inspire des "adventure playgrounds" nés au Danemark et en Angleterre dans les années 40. Il repose sur une idée simple : les enfants apprennent en faisant. Ils expérimentent, testent, prennent des risques... mais toujours avec un accompagnement bienveillant d’adultes formés. Ce sont les animateurs et éducateurs des CEMÉA (Centres d’Entraînement aux Méthodes d'Éducation Active) qui encadrent ce dispositif, avec une approche fondée sur la confiance et l’autonomie.
La première semaine des vacances de printemps, le terrain est ouvert toute la journée, gratuitement, sans inscription, ce qui garantit une accessibilité totale. « C’est un espace d’expérimentation, d’apprentissage et de liberté », explique Anne-Dominique Israël, responsable des développements jeunesse auprès des CEMÉA. « Les enfants y découvrent la coopération, la débrouillardise, le rapport au risque maîtrisé. » Ils peuvent venir quel que soit leur âge. Parfois des mamans y déposent leurs bébés dans un espace adapté et bien surveillé.

Un projet éducatif… et politique
Deux containers aménagés structurent l’espace : l’un sert de boutique, contenant les outils nécessaires à la construction (scies, marteaux, visseuses), l’autre regorge de matériaux en tous genres, soigneusement récupérés. Les enfants fréquentent le lieu, sans programme imposé. Certains construisent des cabanes, d’autres inventent des jeux ou des œuvres artistiques. Tout est permis, ou presque.
Ce terrain n’est pas qu’un lieu de jeu : c’est un acte éducatif fort. Dans un monde où les enfants sont de plus en plus encadrés, normés, surveillés, les CEMÉA revendiquent ici un retour à une éducation active, populaire, fondée sur la confiance et la liberté.
Maîtriser les risques
« Nous défendons l’idée que tous les enfants ont le droit de jouer librement, de créer, d’expérimenter. Nous ne leur imposons rien mais sommes là pour un conseil ou pour leur montrer comment utiliser des outils, explique John Amorès, un des animateurs. Depuis quatre ans, il n’y a eu aucun accident ».
Les parents, souvent impressionnés par la liberté laissée à leurs enfants, deviennent eux aussi partie prenante. Ils découvrent un autre rapport à l’enfance, plus confiant, moins contraint. « Au début, certains étaient un peu inquiets de voir leur enfant avec un marteau ou une scie, se souvient John. Mais très vite, ils réalisent que cette autonomie est encadrée, réfléchie, et que les enfants en sortent grandis ».
