Série "La Graine, monnaie locale de Montpellier" // ÉPISODE 5

Un brasseur de bière artisanale se rémunère et effectue ses achats en Graines

08-12-24 - 06:30
11-12-24 - 10:19
Saviez-vous que Montpellier avait sa monnaie locale ? Il s’agit de la Graine, la monnaie locale de l’Hérault, complémentaire à l’euro et en circulation depuis 2018. Une monnaie soutenue par la Métropole de Montpellier. De nombreux commerçants acceptent d’être payés en graines, des élus perçoivent une part de leurs indemnités en graines, des entreprises rémunèrent leurs salariés en graines... La Graine essaime, son réseau s’étend sur le territoire... Et si vous l’adoptiez ? Les bières artisanales de Quentin Hontans (brasseur Matcé) sont payées en graines par certains de ses clients. Il effectue ensuite ses achats du quotidien avec cette monnaie locale.
Quentin à Castries
Quentin Hontans, de la brasserie Matcé, propose des bières artisanales payables en graines (ici au marché des pros La Graine en octobre dernier à Castries) - ©C. Marson
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Circularité La Graine
©La Graine34

Quentin Hontas, pouvez-vous vous présenter ?

Quentin Hontas : Je fabrique de la bière. J’ai une brasserie dans le quartier des Aubes, la brasserie la Matcé (11, boulevard Mouliners). C’est un atelier de fabrication, mais aussi ma boutique. J’ai une formation d’ingénieur en énergétique industrielle. Après avoir travaillé pendant 10 ans comme salarié, en tant que chargé d’affaires sur des postes qui correspondaient à mon niveau d’études, je me suis mis à mon compte. Entre le confinement et le télétravail, ce fut une période de chamboulement... 

Pourquoi se lancer dans la bière ? 

Parce que c’est un produit qui me plait, à la confluence de plein de choses pour moi. Déjà, on utilise ses mains pour la fabriquer. C’est un parcours de vie. Les précédentes propriétaires de la brasserie, Mattieu et Céline, avaient à peu près le même type de parcours que moi. Je les ai rencontrés lors de Drive Pyaons, un concept de drive permettant à des producteurs de vendre leurs marchandises, lors du confinement de 2020, les marchés de plein air ayant été suspendus. La brasserie existe depuis fin 2019. Je leur ai racheté le fonds de commerce en 2023. 

Comment avez-vous connu la Graine ?

Mattieu et Céline étaient déjà affiliés à la Graine. L'idée était de faire de l’économie circulaire dans le local. Hormis le petit dépliant publicitaire que l’on trouve sur les stands et le fait que les précédents propriétaires de la brasserie l'utilisait, je connaissais un peu la Graine, mais sans plus. Concrètement, j’utilise la Graine uniquement depuis 2023, depuis que je suis un professionnel indépendant tout simplement. Auparavant, je n’en comprenais pas vraiment l’utilité...  L’idée de la Graine, c’est de faire circuler de l’argent local sur un même territoire, sauf que la Graine est aussi en numérique. C’est un changement assez fou, radical et intéressant !

Et vos premières graines ? Billets ou numériques ?

Mes premières graines, je les ai eues parce que l’on m’a commandé de la bière et qu'on m’a payé en graines. Ensuite, je me suis rémunéré en graines. Puis, lorsque j'ai eu besoin d’équipements publicitaires, je me suis tourné vers l’imprimeur Tomoe, qui propose aussi le paiement en graine. Voilà, la Graine, c’est venu comme cela... À titre personnel, c’était une contrainte de changer des euros contre des billets, mais elle est levée grâce à la graine numérique, via l’application qui existe depuis un an. C’est une vraie révolution car vous pouvez payer directement, au centime près, en graines. C’est instantané, pas besoin de se déplacer – vous avez un RIB, vous échangez des graines comme des euros sur un autre compte. En tant que professionnel, quand un client nous donne de la graine numérique, rien n’est prélevé, on reçoit l’intégralité du paiement, à la différence d’un paiement par carte bancaire. L’application La Graine est très bien faite et le site mentionne les professionnels qui utilisent la Graine. 

Quentin
Quentin Hontans
Artisan brasseur de bières, brasserie La Matcé

J’ai appris, notamment par un membre de l'association de La Graine, que le fonds de garantie est géré par la Nef. Cet organisme dispose d’autant d’euros garantis que de graines en circulation, comme dans n’importe quelle banque. Il investit dans des projets locaux, vertueux et solidaires à l’échelle du territoire. C’est un effet de levier porté par une banque qui s’engage. Je ne connais pas forcément les projets, mais c’est ultra important ! C’est un point positif, qui me convient à titre personnel, et qui peut inciter les personnes à utiliser cette monnaie locale. Avant, je n’en comprenais pas trop l’intérêt, mais si derrière effectivement, une banque investit ou agit pour le social, la solidarité et le territoire... Alors, oui, c’est un levier qui me fait changer d’avis ! 

Que vous apporte cette monnaie ?

La Graine m’apporte un petit réseau professionnel. J’utilise les graines à titre professionnel. Pierre Tudisco m’achète de la bière pour sa pizzeria et paie en partie en graines, en partie en euros. De mon côté, j’ai quelques clients particuliers qui m’achètent de la bière en graines, notamment Christophe Brodu, producteur de produits laitiers à base de lait de brebis. C'est un très bon client, et je suis aussi un de ses clients à titre personnel. Ma boutique est ouverte aux professionnels et aux particuliers.

Comment utilisez-vous vos graines ?

Je me rémunère en partie en graines. Je m’en sers pour régler par exemple mes achats personnels à la Ferme des Saveurs (yaourt de brebis, fromage de brebis), dont les gérants sont des clients de la brasserie. Je l'utilise aussi chez les Canotiers (maraîchers bio sur Mauguio) pour ma consommation personnelle de légumes. Tout se mélange un petit peu. C’est une boucle vertueuse, on échange des graines entre nous. Ce pourrait être exactement comme de l’argent liquide, hormis cet investissement de la Nef supplémentaire. Quand j’en parle à mes clients, qui me questionnent, je mets en avant les actions de la Nef. Je montre surtout que l’application numérique, bien plus pratique que les billets, permet de lever certaines freins. Depuis que je suis professionnel, je prends mieux conscience de l’argent liquide, que ce soit des graines ou des euros. Il manque une vraie information au sujet de la Graine, il faut mieux promouvoir cette monnaie locale. 

Quentin Hontas, brasseur
©C. Marson
Quentin Hontas, brasseur
- ©C. Marson

En pratique

Comment se procurer la Graine ?

Adhérer à l’association ADESL-La graine, pour activer son compte billets : 

Commander des billets-coupons papier :

  • En ligne sur le site de paiement sécurisé HelloAsso, pour recevoir les coupons par courrier
  • En visitant un comptoir de change ou le local de La Graine situé au 11 rue Durand à Montpellier.
  • En signant un mandat SEPA, pour un prélèvement sur le compte bancaire

Toutes les informations surLaGraine34

Comment se fait le paiement ? 

  • En billet-coupons. Il n’existe pas de centimes de Graine : par exemple, pour un bien ou service à 4,50€, je donne 2 billets de 2 Graines et 50 centimes d’euro. 
  • Ou sous la forme numérique avec l’APPLI’Graine34. L’appli permet de recharger son compte à partir de sa carte bancaire et de régler la somme exacte, comme n’importe quelle application de paiement.

Quelles enseignes acceptent la Graine ?

Plus de 150 commerces acceptent ce moyen de paiement. Annuaire des prestataires : https://lagraine34.org/prestataires/annuaire-des-prestataires/

 

>>> Retrouvez tous les épisodes de la série sur la Graine sur https://encommun.montpellier.fr/series